La ville de demain est déjà en construction aujourd’hui. Elle ressemblera certainement à une « Smart City ». Une ville intelligente et connectée, où la mobilité a été optimisée afin que tout le monde puisse s’y déplacer de manière efficace et agréable, en toute sécurité. Pour y arriver, les entreprises et les autorités misent sur l’aide des data. Deux entreprises belges ont montré les précieux enseignements qu'elles pouvaient apporter dans un projet pilote lancé à Helsinki.
Grâce aux évolutions technologiques toujours plus poussées, il est désormais possible de collecter une quantité incroyable d’informations. Avec le développement de l’Internet des Objets, qui permet aux objets connectés de communiquer avec les environnements physiques, il est notamment déjà possible de mieux comprendre la mobilité. Audi est déjà très active dans ce domaine et travaille sur plusieurs projets dans le but de fluidifier le trafic et en améliorant notre sécurité au volant grâce à l’IoT (Internet of Things).
Deux entreprises belges, Geo Mobility et xyzt.ai, se sont également spécialisées dans la collecte de ces informations. Elles identifient cette masse de données digitales, appelées data, la quantifient et la trient grâce à des logiciels développés à cet effet. L’utilité de ce travail offre de belles perspectives aux villes. C’est la raison pour laquelle Helsinki a récemment fait appel à eux. La capitale finlandaise veut améliorer sa mobilité, en se basant sur le plus grand nombre de paramètres possible. Michiel Van Hove, Business Development Manager chez Geo Mobility, explique pourquoi les data sont importantes dans ce projet. « Face aux défis actuels, il est devenu logique de se baser sur les data. La mobilité est en constante évolution, les infrastructures ont changé, les modes de transports se multiplient… Les data permettent de mieux quantifier et de garder une vision plus précise de l’évolution d’une situation donnée. »
Geo Mobility multiplie les sources de données
Fondée en 2020, Geo Mobility se définit comme un fournisseur de données objectives, autrement dit conformes à la réalité. Leur démarche pourrait se résumer ainsi : plus il y a de sources de données pertinentes, plus il y a d’informations pertinentes. Et donc une analyse la plus complète possible. Pourquoi Geo Mobility a-t-elle été mise à contribution ? « Helsinki possédait déjà beaucoup de données de comptage, mais pas sur les déplacements – ou les raisons des déplacements – des véhicules », explique Michiel Van Hove. « Chez Geo Mobility, nous collectons des data dans le monde entier. Pour Helsinki, nous avons analysé des data spécifiques provenant des systèmes de navigation des voitures et de l'opérateur téléphonique Telia entre septembre et novembre 2022. Nous avons ainsi identifié les modes et les motifs de déplacement. Dans un cadre plus large, les effets sur la pollution ont également été pris en compte, en comparant le transport routier et maritime. Enfin, nous avons également regardé si les gens allaient faire des achats ou pas. »
La variété des données est très frappante. « La quantité de data nous permet de tirer des conclusions objectives. Avec les données GPS, nous savons d’où les gens viennent, où ils vont. En regardant les dépenses, nous savons pourquoi les gens sont là, peut-être simplement pour faire du shopping. Enfin, la corrélation avec la pollution nous en apprend davantage sur les véritables responsables. Est-ce que ce sont les véhicules ? Ou les bateaux ? C’est ce que nous allons tenter de savoir. »
xyzt.ai : quand les données prennent vie
Une masse de données doit pouvoir être correctement représentée et interprétée. Une tâche que peut parfaitement réaliser le logiciel développé par xyzt.ai. Également impliquée dans le projet en Finlande, la société basée à Louvain a offert un support visuel à toutes ces données. « Elles sont introduites dans la plate-forme par le client lui-même, à l’aide de fichiers Excel ou d’une interface de programmation », entame Lida Joly, CEO de xyzt.ai. « Des graphiques sont ensuite générés. Il est alors possible d’analyser de manière interactive le trafic pour n'importe quelle rue, n'importe quelle période, n'importe quel type de véhicule, grâce aux données GPS des voitures. » Pour l’analyse globale de la situation, les données sont regroupées dans un dashboard, un outil d’évaluation qui reprend tous les indicateurs, et peut être facilement partagé avec les personnes impliquées dans le projet. C’est lui qui servira de base aux décisions futures, qui permettra d’avancer, comme le confirme Lida. « La ville d'Helsinki peut désormais mieux comprendre les sources de données disponibles sur la mobilité et le trafic. » Les autorités doivent maintenant décider des prochaines étapes.
Le projet mené à Helsinki est un « Proof of Concept ». Une démarche qui montre la faisabilité d'un procédé ou d'une innovation, en vue de le déployer éventuellement à grande échelle. Helsinki doit maintenant passer à la vitesse supérieure.
Digital Twin
Une étape possible pourrait être la création d’un digital twin, ou jumeau numérique. Très utilisée dans le développement des Smart Cities, cette technique consiste, comme le nom l’indique, en la création d’une réplique, numérique donc, du modèle étudié. Dans le cas d’Helsinki, il s’agirait d’une modélisation 3D de la ville. Sur la base des données collectées, on y testerait alors virtuellement des améliorations potentielles, sans perdre de vue la situation réelle afin de corriger le tir à tout moment. En effet, un digital twin est toujours connecté avec son modèle de référence, par la collecte des données en temps réel.
Que peut-on étudier pour les villes ? Changement de sens dans une rue, suppression d’un pont, ajout d’une bande de circulation, modification de la durée des feux de signalisation… Tout est possible. Helsinki pourrait s’en inspirer. « Ce n’est pas encore à l’ordre du jour », éclaire Lida. « Mais l’idée est tout de même soumise à la discussion. »
En Belgique, la ville de Bruges s’est lancée dans cette démarche depuis fin 2021, en collaboration avec le centre de recherche imec. Poursuivant des objectifs similaires à ceux d’Helsinki, Bruges y voit là le meilleur outil disponible pour tester ses choix en matière de mobilité. Le projet est actuellement toujours en cours, avec l’aide de nombreux acteurs industriels. Dans un but secondaire, Bruges veut également motiver d’autres villes à reproduire cette initiative.
Les data, alliées de la révolution électrique
Si le développement des Smart Cities est un projet de longue haleine, les data peuvent également aider à prendre des décisions sur des objectifs à court terme, toujours liés à la mobilité. Prenez la conduite électrique, par exemple, dans laquelle Audi est pleinement investie depuis 2018 avec la création d’une gamme complète. Pour que cette mobilité rencontre le succès espéré, elle doit s’accompagner d’une structure efficace. Le point commun avec les data ? Celles-ci pourraient aider dans le placement des bornes de recharge, comme l’explique Lida. « Au vu de l’investissement que représente une nouvelle borne de recharge, il est important de bien réfléchir à son emplacement. Où passent la plupart des véhicules électriques qui ont parcouru environ 400 km et qui sont donc les plus susceptibles de chercher une station de recharge ? Ces informations peuvent être extraites des données GPS des véhicules connectés. »
La conduite autonome, qui pilote les derniers concept-cars futuristes d’Audi, pourrait également profiter des enseignements fournis par les data. Grâce aux informations disponibles sur le trafic, le logiciel sera dans les meilleures conditions pour prendre les bonnes décisions. Le futur de la mobilité pourrait donc bien s’accélérer avec les data...