Une seconde vie pour les pneus
Audi Belgique Sustainability
Une seconde vie pour les pneus

Une seconde vie pour les pneus

Pneus mais aussi ceintures de sécurité, PVC du tableau de bord, chambres à air ou tissu des fauteuils… De nombreux designers font du recyclage des composants de nos véhicules – voitures, camions ou vélos – la source de leur créativité. Des accessoires cyclistes des Belges de Bicloo aux sacs peints à la main des catalans de Pinzat, tour d’horizon de ce qui se fait de mieux en la matière.

Temps de lecture: 5 min

Une seconde vie pour les pneus

Recycler encore mieux

85 844 tonnes de pneus usés ont été collectées en Belgique en 2022, dont 99,81 % ont été revalorisés. Après plusieurs phases de retraitement et de reconditionnement, leurs composants peuvent avoir différents usages. Une part minoritaire sert de combustible dans l’industrie, notamment pour les cimenteries. Le reste est utilisé comme matière première pour le ballast des voies de tram, pour confectionner les dalles amortissantes qu’on trouve sur certaines aires de jeu ou encore pour fabriquer des éléments de mobilier urbain. L’obligation de reprise des pneus usagés en Belgique explique bien sûr en grande partie ces chiffres largement positifs. Mais les résultats pourraient être plus intéressants du point de vue écologique et environnemental, en augmentant par exemple la part de réutilisation directe ou en favorisant des formes de recyclage vertueux ou d’upcycling. Plusieurs projets visionnaires montrent la voie dans ce sens, en valorisant non seulement les pneus mais aussi les chambres à air et parfois même d’autres éléments comme les ceintures de sécurité.

Une question de bon sens

Co-fondateur de la start-up tournaisienne Bicloo, Valentin De Rodder est intarissable sur les possibilités d’utilisation de ces matières premières négligées. « Il y a environ 7 millions de vélos en Belgique. Ce qui représente chaque année quelque 1 750 tonnes de chambres à air à remplacer. Dans les magasins spécialisés et les ateliers de réparation, on a l’habitude de les jeter. Notre idée a été de les récupérer et de nous en servir pour fabriquer des produits de maroquinerie ». « Aujourd’hui les chambres à air sont tout simplement brûlées », poursuit son comparse Maxime Delehouzée. « Nous faisons appel au bon sens des professionnels, qui acceptent de travailler avec nous et permettent ainsi la réutilisation intelligente d’un déchet auquel nous apportons une valeur ajoutée, et au bon sens des consommateurs qui achètent un produit écoresponsable local, fabriqué en Belgique ». Fondé en 2020, Bicloo propose désormais toute une gamme qui va des sacoches de selle ou de guidon pour les cyclistes aux mallettes pour ordinateur en passant par les porte-monnaies et les fourre-tout. Cerise sur le gâteau, l’intégralité du catalogue est confectionnée en collaboration avec l’Entreprise de Travail Adapté Les Érables qui emploie des personnes en situation de handicap et facilite leur insertion professionnelle. Un volet social qui ne fait qu’ajouter à la pertinence du bel exemple belge donné par Bicloo.

Sur les routes du monde entier

Hors de nos frontières, on se passionne aussi pour la revalorisation des pneus et des chambres à air. Fondée il y a 10 ans à Turin, l’atelier Cingomma s’est tout d’abord spécialisée dans le design et la fabrication de ceintures, y compris des ceintures ‘souvenir’ réalisées à partir d’un pneu spécifique envoyé par son propriétaire. Après avoir mis au point sa méthode de retraitement des caoutchoucs et des plastiques – un double lavage à plus de 100°C suivi de la découpe et de la couture des pièces – Maurizio Sacco l’a rapidement appliquée à des créations toujours plus ambitieuses, passant des sacs à dos aux sacs de voyages puis aux semelles de chaussures et enfin aux fauteuils… Aux Pays-Bas, Angela Rooijmans relaye quant à elle Ecowings, l’initiative de retraitement de pneus de Kapil Sharma, professeur de design industriel à l’université d’Avantika, dans l’état du Madhya Pradesh en Inde, et de son épouse Uma Sharma. Le couple a mis en place un réseau de recyclage des caoutchoucs synthétiques qui associe la valorisation de pneus de voitures mais aussi de pneus de véhicules utilitaires, de tracteurs et de camions – sous forme de sacs à dos, de pochettes, de valises, de ceintures et de divers accessoires – à un volet de développement des communautés locales.

Un canevas pour les artistes

On passe encore une étape avec Pinzat, petite échoppe bien cachée dans le dédale des rues médiévales du quartier d’El Born, à Barcelone. Samuel Nualart et Dolça Teruel assurent la jonction entre le recyclage et l’art contemporain. Ils utilisent non seulement des caoutchoucs synthétiques et des pvc récupérés sur des voitures pour fabriquer leurs sacs, mais également les ceintures de sécurité, y compris le système d’attache, pour réaliser les bandoulières. Empreintes de culture urbaine, leurs créations sont équipées d’attaches à cadre de vélo, de fixation pour planches de skateboards et même de badges NFC configurables. On peut y inscrire des informations personnelles auxquelles chacun pourra accéder via son smartphone. Une bonne façon de transmettre ses coordonnées ou un message. Mais ce qui fait de Pinzat un projet totalement à part, ce sont les visuels qui figurent sur les sacs. Peints à la main par des artistes issus pour la plupart de la scène street art ou graffiti, ce sont des pièces uniques qui constituent un véritable musée ambulant du graphisme urbain actuel. Le beau au service du bien, et réciproquement. La boucle de l’upcycling ne pouvait pas être bouclée de meilleure manière.