Quand le plastique se fait tout bio
Audi Belgique Sustainability
Quand le plastique se fait tout bio

Quand le plastique se fait tout bio

Pouvons-nous nous passer du plastique ? Si l’impact de ce matériau de synthèse sur notre environnement est aujourd’hui avéré, nous en produisons pourtant de plus en plus. Audi a lancé plusieurs projets afin de réduire la part de plastique dans ses voitures. Mais quelles sont les alternatives ? Tour d’horizon des bioplastiques les plus innovants.

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Quand le plastique se fait tout bio

Changer la donne

Fin mai 2023, les représentants de 175 pays se sont réunis à Paris afin de négocier un traité mondial contre la pollution plastique. La production mondiale actuelle s’élève en effet à 460 millions de tonnes par an et devrait tripler d’ici à 2060 – selon l’OCDE – pour atteindre 1,2 milliard de tonnes. Cette augmentation aurait pour conséquence une production de déchets plastiques de plus d’1 milliard de tonnes. Aujourd’hui, plus d’un tiers de la production de plastique concerne les emballages alimentaires. Alors à l’heure de partir sur la route des vacances, pourquoi ne pas essayer de remplacer bouteilles de soda et autres paquets de chips par des alternatives moins polluantes ?

Les plastiques font partie d’une famille de matériaux appelés ‘polymères’ et ont la particularité d’être produits à 99 % à partir d’énergies fossiles – notamment les dérivés pétrochimiques. Il existe néanmoins des polymères naturels – comme le caoutchouc – et les technologies modernes permettent de fabriquer des polymères capables de remplacer le plastique à partir de sources durables : plantes, algues, déchets organiques ou mêmes insectes…

Des insectes et des plantes

C’est en utilisant les vers de farine, des larves de coléoptère très prisées des pêcheurs à la ligne, que Charlotte Böhning et Mary Lempres, fondatrices du studio de design Doppelgänger, ont mis au point un tout nouveau bioplastique baptisé Chitofoam, capable non seulement de remplacer le polystyrène mais aussi de le recycler. Les larves se nourrissent tout d’abord des déchets de plastiques – que leur métabolisme unique leur permet de digérer. Leur exosquelette sert ensuite de base à ce matériau totalement biodégradable mais résistant à l’eau et aux chocs, qui peut être travaillé sous forme de sachet, de protection ou même de gobelet.

En Turquie, le studio Alara Ertenü a conçu Packioli, un emballage spécifique pour les blocs de savon, lui aussi résistant à l’eau mais qui se dissout naturellement dans l’environnement après usage, au bout d’une dizaine de jours. Ce sont cette fois les cosses de petit-pois et les feuilles d’artichauts qui constituent la matière première. Une revalorisation particulièrement efficace quand on sait que seuls 20 % du volume total de la production d’artichauts sont effectivement traités par l’industrie agro-alimentaire, le reste étant considéré comme du déchet. Packioli se présente sous la forme de fines pellicules translucides qui peuvent également être imprimées et façonnées selon le volume du savon.

Rien ne se perd

Nous utilisons tous régulièrement du plastique pour conserver nos aliments ou pour transporter notre déjeuner au bureau ou en voiture. Deux jeunes australiens, Jordy et Julian Kay, ont voulu imaginer une solution écologique pour remplacer le fameux ‘wrap’ extensible qu’on trouve dans toutes les cuisines, y compris chez les professionnels de la restauration pour qui les normes d’hygiène sont encore plus strictes. En collaboration avec une équipe de scientifiques et de bio-ingénieurs, ils ont développé le premier film alimentaire compostable fabriqué à partir de déchets.

Leur invention, Great Wrap, est constituée de résidus de pommes de terre, de tapioca et d’huiles végétales recyclées. Les constituants sont réduits en granules et incorporés à un biopolymère compostable, le pbat, déjà largement répandu mais qui ne possède pas les qualités d’élasticité nécessaires à un film alimentaire. En suivant la même formule, ils ont également pu mettre au point un film de grandes dimensions adapté à l’emballage des palettes de colis industriels.

La magie des algues

Le plus grand fabricant mondial de soda produit, pour sa boisson phare, 3 800 bouteilles en plastique… par seconde. Après s’être rencontrés lors de leurs études de design et d’ingénierie à l’Imperial College de Londres, Rodrigo Garcia Gonzalez et Pierre Paslier ont décidé de s’attaquer à ce problème. Ou comment réinventer les contenants pour liquides tout en conservant la facilité d’usage qu’offre le plastique. L’acte fondateur de leur start-up Notpla a été le remplacement de tous les gobelets et bouteilles d’eau du marathon de Londres 2019 par leur toute première invention : Ooho. 36 000 de ces capsules consommables remplies d’eau ont été distribuées aux participants, économisant par la même occasion plus de quatre tonnes de déchets plastiques sur l’événement sportif.

Capables de contenir toutes sortes de liquides – y compris des sodas ou même des sauces – les capsules de Ooho sont réalisées à partir d’algues. La pellicule extérieure peut se manger, sans apporter aucun goût, ou se biodégrader en quelques jours, sans aucun résidu chimique. En partant de la même technologie de retraitement des algues, Gonzalez et Pasquier ont développé une série d’autres innovations. Après extraction de la gélatine – qui sert de base aux capsules – les fibres d’algues restantes sont valorisées comme de la cellulose pour produire du papier. Elles sont également associées à des déchets de biomasse pour obtenir un ‘plastique’ rigide totalement organique qui peut être façonné sous différentes formes – emballages, pots, contenants. Pipettes, film pour carton alimentaire, billes de dentifrice, sachets… les grands industriels sont déjà partenaires du duo londonien, qui démontre à sa façon que le progrès vient de la technique. Et qui nous ouvre les voies du monde de demain.