Les panneaux photovoltaïques que l’on voit fleurir sur presque tous les toits des maisons belges constituent une source d’énergie durable particulièrement adaptée à la recharge des véhicules électriques – domaine dans lequel Audi est actif depuis plusieurs années. La designer néerlandaise Marjan van Aubel en a quant à elle fait l’inspiration principale de ses créations, transformant la lumière solaire en matériau à part entière.
Un monde toujours plus solaire
Selon un rapport de l’agence de promotion de l’énergie solaire SolarPower Europe publié en mai 2022, la Belgique est le cinquième pays au monde comptant le plus de panneaux solaires par habitant, derrière l’Australie, les Pays-Bas, l’Allemagne et le Japon. À l’échelle mondiale, la capacité solaire a été multipliée par 500 en vingt ans, avec une accélération récente puisqu’elle a triplé en l’espace de trois ans pour atteindre le seuil symbolique d’un térawatt. Toujours d’après SolarPower, la tendance va encore s’accélérer. En 2025, la capacité solaire à l’échelle du globe devrait atteindre 2,3 térawatts. Dans le mix énergétique belge, l’électricité ne compte actuellement que pour 30 % du total, mais on peut imaginer que les besoins liés à la mobilité électrique et le développement des panneaux photovoltaïques vont faire augmenter cette part. Est-ce que cela signifie que nous sommes condamnés à contempler des champs de plaques noires en lieu et place de nos toits d’ardoises ? Internationalement reconnue, une jeune créatrice native de la province de Zélande aux Pays-Bas nous montre une autre voie.
Des vitraux futuristes
Diplômée de la prestigieuse Gerrit Rietveld Académie d’Amsterdam et du Royal College of Art de Londres, Marjan van Aubel s’intéresse depuis sa jeunesse au design solaire et au rôle que peut jouer cette énergie naturelle dans notre vivre-ensemble. Toute son œuvre cherche à faire évoluer notre vision de la technologie solaire qu’elle intègre de façon à la fois esthétique et fonctionnelle dans ses créations. En 2020, elle a conçu pour le pavillon néerlandais de l’exposition universelle de Dubaï un plafond composé de panneaux solaires colorés et translucides, dont elle a expliqué le fonctionnement au magazine de design Dezeen : « À différents moments de la journée, la lumière, les ombres et les couleurs changent et créent une expérience immersive constamment évolutive, similaire à celle produite par des vitraux. Les panneaux fournissent l’énergie du pavillon et les couleurs choisies contribuent au maintien d’une température adaptée ». Conçu comme un biotope auto-suffisant, le pavillon néerlandais générait en effet sa propre énergie (grâce aux panneaux solaires) mais aussi sa propre eau et ses propres végétaux. La couleur des panneaux laissait passer les fréquences lumineuses comprises entre 400 et 700 nanomètres nécessaires aux plantes pour réaliser la photosynthèse.
Une technologie organique
L’alliance de l’esthétique et de la technologie est essentielle dans le travail de Marjan van Aubel. Pour le pavillon de Dubaï, elle a ainsi utilisé des matériaux durables, notamment des teintures organiques recouvrant des nanomatériaux capables de convertir les rayons du soleil en électricité qui ont ensuite été imprimés sur un film en PET recyclable. Ce dernier, collé entre deux plaques de verre, devenant ainsi un panneau photovoltaïque nouvelle génération entre œuvre d’art et prouesse technique. « Nous ne changerons pas le monde avec des objets laids. C’est quand les choses sont à la fois belles et pertinentes que nous pouvons réellement modifier les perspectives ». Cette volonté de faire évoluer le regard en alliant beauté, préoccupations écologiques et innovations scientifiques dans un même objet se retrouve aussi dans des créations grand public et volontairement accessibles. La designer néerlandaise a ainsi conçu une lampe d’intérieur, baptisée Sunne, qui emmagasine la lumière du jour et la stocke dans une batterie. Suspendue à une vitre, elle restitue ensuite cette énergie et peut ainsi éclairer une pièce toute une nuit.
Laissons entrer le soleil
Marjan van Aubel va encore plus loin en intégrant des panneaux photovoltaïques dans les objets. Elle fait appel pour cela à des innovations technologiques de pointe, en mettant l’accent sur la durabilité. Premier exemple avec sa Current Table. Un panneau orange en verre reposant sur deux trépieds et équipé de deux prises USB. L’intérieur de la plaque de verre est un panneau photovoltaïque qui utilise le spectre des couleurs pour générer un courant électrique, à la manière d’une plante réalisant le processus de photosynthèse. Ce courant électrique, produit en intérieur et sans avoir besoin d’une lumière solaire directe, alimente les prises USB avec lesquelles on peut recharger un GSM. Autre illustration avec sa plus récente création, une tapisserie réalisée à partir de bandeaux photovoltaïques souples dont elle combine les couleurs et les formes géométriques. Les cellules de captation de la lumière, confectionnées à partir de matière organique, sont quarante fois plus légères et mille fois plus fines que les cellules classiques en silicone. Tout comme la lampe Sunne, elles récoltent la lumière du jour et la restituent à la tombée du soir. « Une surface colorée, transparente et flexible offre beaucoup plus de possibilités d’utilisation et de design », conclue Marjan van Aubel. « Le panneau solaire devient un matériau en soi avec lequel on peut travailler comme avec du verre ou de l’argile. Je pense qu’il est important de montrer que l’énergie solaire peut être une forme d’art. Elle devient alors quelque chose de désirable, qu’on souhaite avoir autour de soi au lieu de vouloir la cacher ».